J.M.G. Le Clézio

Textes composés par les étudiants
du cours ATELIER DE LECTURE ET ECRITURE CREATIVE,
inspirés par 'L'enfant de sous le pont' de J.M.G. Le Clézio.

L’anniversaire

Il y a 15 ans, un homme sans abri appelé Ali habitait sous un pont. Un jour, il découvrit un nouveau-né abandonné sur son lit de fortune. Ali nomma la petite fille Amina et, avec beaucoup d’aide, il l’éleva. L’histoire suivante se déroule dans leur petite maison, un logement social.

Un bel après-midi, tard en automne, la nature portait encore son habit de l’été passé : les feuilles cuivrées s’accrochaient obstinément aux branches des arbres et les herbes hâlées émettaient les parfums de la chaleur d’août. Ali, un grand homme droit, ni jeune ni âgé, marchait le long des rues vers sa modeste maison. Ses pas étaient rapides et résolus, ceux d’un homme avec une mission. Dans sa tête, il préparait le gâteau pour sa fille Amina qui aurait 15 ans le lendemain. Je peux le décorer de trois chatons blancs. Il a souri.

Comme d’habitude, Blanche-Neige, la mère des dits chatons, l’attendait à sa barrière. « Blanche, mon petit pigeon, mon petit ours. Fine, fine, fine chatte, couleur de neige… » Blanche a ronronné sa réponse, le suivant vers la boite aux lettres où il a trouvé son courrier. La maison était vide. Bon. Il avait deux heures devant lui pour finir ce gâteau d’anniversaire. « Pour ma fille », il a dit à haute voix, savourant les mots, si doux, si tendres.

Puis, il remarqua quelque chose d’inattendu. Parmi les lettres qu’il avait jetées sur la table se trouvait une enveloppe adressée à sa fille : « A Mlle Amina Dupont » Il cligna des yeux. Impossible ! Sa fille ne recevait jamais de lettres, encore moins une lettre officielle. Qu’est-ce que ça voulait dire ? Il fixa l’enveloppe. Soudain, d’un seul coup, ça fit tilt. C’était une lettre de Puzzle. Il en était sûr. Une lettre de cette organisation qui aidait les enfants adoptifs à retrouver leurs parents biologiques. Il gémit. « Quelle intrusion ! Et si je la détruisais ! Elle ne le saurait jamais. » Mais pourquoi était-elle arrivée ce jour-là ?

Il resta longtemps assis, essayant de rassembler les fragments. Il se rappela que récemment Amina avait été fascinée par une émission de télévision sur Puzzle et que, par hasard, il l’avait entendue parler à la chatte : « T’es une gentille maman, Blanche ! Mais où est ma maman ? Tu le sais ? Où est-elle ? » A ce moment-là, il se sentit mal à l’aise, intrusif. Mais il commençait à comprendre que sa fille voulait vraiment retrouver sa mère perdue.

Soudain, il entendit ses pas. « Coucou, Papa ! – Salut Amina ! Il y a une lettre pour toi. » Elle la lui arracha des mains, déchirant l’enveloppe. Un cri de triomphe ! « Papa, papa, ils ont trouvé ma mère et elle veut me rencontrer. Quel beau cadeau pour mon anniversaire ! » Ali lui sourit mais son cœur pleurait.

PAR ERIN GABRIELLE WHITE

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Ali et Amina

Ali, le chiffonnier, sans abri, a essayé de continuer sa vie sous le pont. Mais il a vite compris que c’était impossible avec un bébé. Maintenant lui et Amina habitent dans un cottage sur le terrain de l’église locale.

C’était une belle matinée d’octobre, l’automne était chaud, comme d’habitude dans le Sud. La brise automnale descendait des montagnes, Ali a boutonné sa veste pour se protéger du vent. C’était une nouvelle veste ; un cadeau d’anniversaire d’Amina.

Ali n’avait jamais été religieux, cependant l’église était devenue son alliée au fil des ans. En nettoyant la nef, il s’est souvenu du jour où il l’avait trouvée. Elle était froide et nue, il pensait qu’elle mourrait s’il ne pouvait pas trouver de l’aide. Il s’est dépêché d’aller à l’église. Il souriait en se souvenant que le père François et la sœur Bernadette semblaient très suspicieux lorsqu’il est apparu avec un paquet aux cris perçants enveloppé dans une couverture militaire. Initialement ils avait suggéré que ce serait mieux si elle vivait en permanence au couvent. Cependant, ils ont vu qu’il était dévoué à la petite fillette . Ils sont devenus des parrains qui ont partagé son éducation.

Ali n’était plus estrassier, il travaillait comme concierge et bricoleur dans l’église et le couvent. Son chemin de vie avait changé. Il était un employé fiable, et un père responsable. Il y avait une nouvelle dignité retrouvée dans son comportement. Il se coupa les cheveux et la barbe, il acheta de nouveaux vêtements. Ses mains étaient encore gercées et parfois noircies, et il prenait une bière de temps en temps avec père François. Certainement sa raison de vivre tournait autour d’Amina et de son bien-être.

Sa fille adoptive était devenue une petite femme délicate aux cheveux blonds, un doux sourire et une belle voix. Ali aimait l’entendre chanter dans sa chorale. Amina chantait quand elle était heureuse, quand elle était occupée, et surtout quand ils marchaient sous le pont avec leur chien.

Les cloches de l’église sonnèrent l’Angélus. Midi. L’heure du déjeuner. Alors qu’il emballait ses outils il la vit courir vers lui. « Papa Ali, Papa Ali, regarde, regarde », cria-t-elle. Il vit qu’elle avait un papier dans la main. « Elle est arrivée, la lettre, nous allons à Paris pour le grand concert de notre chorale », cria-t-elle encore. Il ressentait un mélange de fierté, de peur et de choc. Pendant des semaines, ils discutèrent du voyage. Alors la voix qui l’avait appelé quinze ans plus tôt allait maintenant le quitter. « Ne t’inquiète pas, Papa Ali, c’est seulement pour deux semaines. », s’exclama Amina.

PAR ANN B

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Ali et Amina

Quinze ans déjà ! Une célébration de la vie ensemble.

Le soleil était une boule rouge à l’horizon. A l’intérieur de l’appartement, il tombait sur le plancher à travers les persiennes et cette lumière dessinait des motifs à rayures orange sur le tapis. Le chant des oiseaux s’infiltrait dans la chambre. Ali avait décidé de faire la grasse matinée, mais son chat Cendrillon pensait autrementavait une tout autre idée pour avoir dormi dehors : impatient, le félinil voulait prendre son petit déjeuner immédiatement.

Avant de se lever, Ali réfléchissait aux changements dans sa vie depuis l’arrivée de la petite Amina. Ce jour-là, il l’avait découverte, une poupée vivante fragile, nouveau-née et toute nue, qui criait de faim et de froid. Il était tombé amoureux de ce petit bout de chou, qui changeait sa vie à lui. Dès lors, il réussissait tout ce qu’il entreprenait : désintoxication, travail et appartement. C’était quelque chose de remarquable.

Père et fille, ils se sentaient très proches. Pour commémorer leur premier jour ensemble, Ali avait choisi la même date pour les deux anniversaires et aujourd’hui c’était leur anniversaire. Il a entendu un bruit de vaisselle et Ali pensait que sûrement, c’était Amina qui préparait le café. Il reniflait l’odeur qui pénétrait dans sa chambre. Après avoir frappé à la porte, Amina entrait, vêtue d’une robe très élégante qu’elle avait faite elle-même la veille. Elle portait un plateau chargé de jus d’orange, de croissants et de confiture. « On va manger ensemble ». Une spirale de fumée montait de la cafetière.

Soudain, ils entendirent le bruit de la boîte aux lettres sur le palier. Ali aperçut la fébrilité d’Amina qui quittait la chambre à la hâte, vers la porte d’entrée. A son retour, elle portait une lettre dans ses mains. Ses lèvres tremblaient d’inquiétude.

A l’âge de quinze ans, Amina était une fille courageuse et belle comme une fleur avec ses cheveux châtain, frisés, le teint de rose et ses yeux vert clair. Oserait-elle ouvrir l’enveloppe ? Elle avait été expédiée par l’Education nationale. Son sang se figea dans ses veines. Amina prit son courage à deux mains et elle l’ouvrit calmement, ses yeux lisaient la page en diagonale, quand elle poussa de grands éclats de rire. « Joyeux anniversaire Papa, je suis acceptée comme apprentie de mode. Un jour, je vais travaillerai chez les plus grands couturiers à Paris ».

PAR ROSE CHENEY

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Une famille augmentée

Ali et Amina vivent dans un petit appartement près du port de Marseille. Ali travaille pour le « Resto du cœur ». Pour élever Amina, qu’il a adoptée, il est devenu un citoyen honorable, propre, sérieux, sobre et sans barbe. Il est devenu un parent idéal. Amina florissait au lycée voisin.

Un après-midi d’hiver – sous les rayons de soleil faible et les flocons de neige – Ali regardait par la fenêtre. Il attendait le retour de sa fille, tant aimée. Il pensait au moment qui avait suivi la nuit où il l’avait découverte dans un carton sous le pont. Il entendait encore les voix – la police, les ambulanciers, les infirmières, les nonnes, les assistantes sociales ; tous disaient qu’il devait laisser le bébé à ceux capables d’éduquer les orphelins. Finalement, un magistrat avait dit qu’il pourrait essayer d’élever le bébé s’il se soumettait aux contraintes. Après avoir satisfait toutes les conditions, Ali devait encore écouter les voix grinçantes de doute. Quelque chose d’inconvenant, quelque chose d’égrillard. « Un père célibataire n’est pas capable d’élever une petite fille ».

Amina était en retard. Où était-elle ? Ali commençait à s’inquiéter. Le chat Cendrillon se frottait à ses jambes pour le rassurer. Elle pensait aux voix qui criaient : « Impossible d’avoir un chat et un bébé dans la même chambre ».

Le ciel s’assombrit et la lumière disparut. Le vent s’intensifia. Soudain la porte s’ouvrit violemment. La voici, Amina, sans manteau, frissonnante. Elle allait de pair, avec un petit garçon à la peau noire, enveloppé dans son imperméable. Pauvre Ali ! Sa tasse tomba sur le plancher, ses yeux s’envolèrent vers le plafond. Dans sa tête, les voix recommencèrent.

Amina embrassa son père, sans hésitation elle lui expliqua qu’elle avait vu Abdu tout seul sur un quai désert tout près du lycée. Il avait perdu ses parents sur leur route en provenance d’Afrique, et elle décida qu’il allait être son frère et le fils d’Ali. Pauvre Ali, de nouveau ! Il resta debout stupéfié, incapable de lui expliquer qu’Abdu n’était pas un chiot… mais il devait obéir aux ordres de sa princesse pour l’avoir aimé toute sa vie. Assurée de la complicité de son père, Amina, comblée de joie, prépara très vite de la soupe, un bain chaud et des vêtements pour Abdu. Cendrillon aussi partagea leur joie avec un petit morceau de saumon inattendu.

Oui, les voix allaient revenir. Tout donnait à penser que cette famille, avec deux enfants intelligents et amusants, et leur père heureux, fier comme un paon, possédait toutes les armes pour réussir.

PAR CARMEL MAGUIRE

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La fin de l’enfance

A l’âge de 15 ans, Amina habitait dans un foyer près du lycée…

C’était un beau matin d’automne, frais et clair. Les petits nuages parcouraient le ciel mais aucun signe de pluie. Amina arpentait le bord du canal où l’eau réfléchissait les nuages comme un miroir. Elle allait vers le pont, son abri d’enfance, où elle habitait avec l’homme qu’elle appelait « Papa Ali ». Elle était très heureuse au foyer avec les autres filles, pour avoir eu un lit propre, des vêtements nouveaux pour l’école, un petit bureau pour ses devoirs. Mais elle gardait de bons souvenirs de son enfance sous le pont avec le gentil Ali. Elle attendait avec impatience de le revoir et de lui raconter toutes les nouvelles de la rentrée.

De loin elle remarquait le tas de cartons où, avec ses petits amis, ils avaient joué, faisant des maisons en cartons ou des tentes avec les couvertures, et jouant à cache-cache avec Cendrillon le chat. Ses amis appelaient Amina « poupée d’estrassier « , mais Ali était toujours bienveillant envers les enfants, et souvent trouvait quelques petits biscuits ou des bonbons pour les régaler.

En s’approchant du pont, Amina pouvait voir l’ancienne couverture militaire, rêche et sale, mais très efficace contre le vent et le froid de l’hiver. Et sur la couverture une petite bosse. Elle savait bien, ça serait Cendrillon. Ce chat gris qui l’avait réchauffée dans le lit, qui avait ronronné toute la nuit et qui avait bercé tous ses rêves, en rond près de ses pieds. Amina s’est mise à courir. Ce vieux chat miteux, qui bavait beaucoup aujourd’hui, restait cher à son coeur.

Elle s’approcha de la couverture et s’agenouilla. Elle remarqua quelque chose de trop silencieux, de trop tranquille. Elle appela à haute voix, « Cendrillon, Cendrillon. » Aucune voix en réponse. Elle mit ses mains au-dessus de la petite bosse. Froid. Son cœur se contracta. Elle souleva la couverture avec soin et dévoila le petit cadavre mince de son chat. Il était mort.

Amina resta longtemps à côté de Cendrillon, caressa ses poils rêches et froids. Elle mit un chiffon sous sa tête trempée de salive, et elle pleura.

Enfin elle entendit le grincement de l’ancienne poussette-landau, son chariot de bébé. Ali la poussait le long du canal, chantant d’une voix rauque. Il avait sans doute bu une bonne lampée du vin avant son retour avec les trésors du jour. Il sourit de sa bouche édentée quand il vit Amina et il lui fit signe de la main…

PAR ANGELA LOW

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